S’informer sur les Directives Anticipées

par le Docteur Didier Potier, conseiller médical de la Mutuelle Saint-Martin

Notre fin de vie et donc notre mort nous font peur. Elles renvoient à notre vulnérabilité, à la souffrance, à la perte, à l’inimaginable. La science médicale semble pouvoir nous maintenir artificiellement en vie presque indéfiniment mais est-ce vraiment une vie ? Si nous ne pouvons maitriser notre mort, il est possible d’anticiper et au moins essayer de maitriser notre fin de vie. C’est ce que permettent les lois Leonetti de 2005 et Claeys-Leonetti de 2016 en donnant aux citoyens les droits à accepter ou refuser les soins proposés. Par la possibilité de rédiger des Directives Anticipées opposables, elles renforcent cette liberté jusqu’au moment de l’inconscience ou de l’impossibilité de prendre des décisions.

Que sont les Directives Anticipées ?

Les Directives Anticipées permettent d’exprimer, par avance, la volonté de poursuivre, limiter, arrêter ou refuser des traitements ou actes médicaux, pour le jour où l’on ne peut plus le faire soi-même, par exemple du fait d’un accident ou d’une maladie grave.

Chacun peut écrire ses Directives Anticipées. C’est un droit, depuis les lois précédemment citées, mais pas une obligation.

Quel est la portée des Directives Anticipées dans la décision médicale ?

Depuis la loi du 2 février 2016, les Directives Anticipées s’imposent au médecin : il doit les appliquer. Leur contenu prime alors sur les différents avis et témoignages de la personne de confiance ou des proches. Le médecin ne peut refuser de les appliquer que dans deux situations : en cas d’urgence vitale le temps d’évaluer la situation et lorsque les Directives Anticipées lui apparaissent inappropriées ou non conformes à la situation médicale.

Dans ce dernier cas, il ne peut refuser de les appliquer qu’après avoir consulté l’ensemble de l’équipe soignante et un confrère indépendant, et après avoir recueilli le témoignage de la personne de confiance si elle a été désignée ou à défaut celui de la famille ou des proches. Il doit préciser dans le dossier médical pourquoi il décide de passer outre.

Pourquoi rédiger des Directives Anticipées ?

La première et la principale raison est que les Directives Anticipées sont un outil de liberté et d’autonomie individuelle. Les Directives Anticipées sont un moyen d’exprimer la volonté que la fin de vie soit conforme à ce que l’on a été et ce à quoi on a cru de son vivant.

Si les Directives Anticipées permettent de faire connaître et respecter ses valeurs, elles demandent de réfléchir à ce qu’elles sont. Rédiger des Directives Anticipées oblige à prendre le temps de la réflexion, à un retour sur soi, et souvent aussi à partager cette réflexion avec sa famille, ses proches, son médecin traitant.

En troisième point, les Directives Anticipées permettent de décharger les proches et les médecins de la responsabilité de décisions difficiles. C’est aussi pour les autres que l’on écrit des Directives Anticipées, et non uniquement pour soi. Écrire des Directives Anticipées évite aux proches d’avoir à prendre des décisions de vie et de mort pour une personne aimée, les protège d’avoir à porter la responsabilité d’une telle décision, leur évite toute forme de culpabilité. Les Directives Anticipées sont aussi une preuve d’amour.

Qui peut rédiger des Directives Anticipées et quand le faire ?

Toute personne majeure peut, si elle le souhaite, rédiger des Directives Anticipées. Si elle bénéficie d’un régime de protection légale (tutelle ou curatelle), elle doit demander l’autorisation du juge ou, le cas échéant, du conseil de famille.

Les Directives Anticipées peuvent être modifiées totalement ou partiellement, voire annulées, à tout moment et par tout moyen. Depuis la loi du 2 février 2016, elles sont valables indéfiniment, tant qu’elles n’ont pas été modifiées par la personne elle-même.

En mai 2019, 13 % des français de plus de 50 ans et 21 % des plus de 75 ans avaient rédigé des Directives Anticipées.

Où conserver les Directives Anticipées ?

Pour que les Directives Anticipées puissent être appliquées elles doivent être accessibles.

Il est essentiel que médecin et proches soient informés de leur existence et de leur lieu de conservation. Ainsi, le jour venu, le médecin qui accompagnera la fin de vie saura où trouver les directives afin de les mettre en œuvre. Plusieurs possibilités existent pour conserver les Directives Anticipées :

  • Le Dossier Médical Partagé (DMP). S’il existe, il est recommandé d’y enregistrer les Directives Anticipées car elles seront ainsi aisément consultables en cas de besoin.
  • Le médecin traitant qui les conservera dans le dossier médical.
  • L’hôpital ou tout autre établissement de santé peut recevoir ces Directives Anticipées lors de l’admission. Elles seront intégrées au dossier médical.
  • La « personne de confiance » qui gardera ces Directives Anticipées et les divulguera si nécessaire.
  • Chez soi et/ou avoir sur soi une indication du lieu de leur conservation.

Quel est le rôle de la personne de confiance ?

Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance (parent, proche, médecin traitant...) qui pourra :

  • L’accompagner et l’assister dans ses démarches concernant sa santé,
  • Transmettre à l’équipe médicale ses volontés (par exemple les Directives Anticipées si elles ont été rédigées) dans l’hypothèse où elle serait hors d’état de s’exprimer.
  • La représenter auprès du personnel médical en matière de soins et d’actes médicaux.

La personne de confiance a tous les droits de la personne qu’elle représente. En l’absence de Directives Anticipées, son avis l’emporte sur tout autre avis (famille, proche). Mais elle ne peut pas se faire communiquer le dossier médical de la personne qui l’a désignée.

La désignation d’une personne de confiance peut être faite à tout moment (elle sera systématiquement demandée lors d’une hospitalisation). Elle est révisable et révocable.

La personne de confiance peut être désignée sur papier libre, sur un formulaire à l’entrée d’un établissement de santé ou accompagnant les Directives Anticipées.

La personne de confiance ne doit pas être confondue avec la personne à prévenir même si la même personne peut tenir les deux rôles.

Comme pour les Directives Anticipées, la désignation d’une personne de confiance est un droit et non une obligation.

Comment rédiger des Directives Anticipées ?

Si la rédaction de Directives Anticipées nécessite un temps de réflexion, elle demande aussi un temps de partage, de dialogue. Il semble difficile de rédiger des Directives Anticipées seul. En parler avec un proche (la personne de confiance par exemple), sa famille, son médecin traitant est recommandé.

Si la personne est dans l’impossibilité physique d’écrire, ses Directives Anticipées peuvent être rédigées à sa place. Le document n’est cependant valide que si deux témoins attestent par écrit que ce document est bien l’expression libre et éclairée de la volonté de la personne.

Les Directives Anticipées peuvent être rédigées sur papier libre ou sur le modèle disponible sur différents sites officiels ( Voir paragraphe «Sources » en fin d’article). Ce modèle est clair et complet. L’utiliser garantit que l’expression de la volonté répond aux conditions de validité prévues par les textes.

Que contiennent les Directives Anticipées ?

En dehors des données administratives (coordonnées de la personne concernée et, éventuellement, de la personne de confiance), les Directives Anticipées contiennent, d’une part, des informations annexes qu’il semble important à la personne de communiquer (peur, conviction, souhaits…) et ,d’autre part, des directives sur les grands principes qui devront guider la prise en charge médicale de la fin de vie.

Suivant le modèle cité, les réponses à trois questions essentielles permettent de résumer ces grands principes :

1. A propos des situations dans lesquelles je veux ou je ne veux pas que l’on continue à me maintenir artificiellement en vie

Par exemple : traumatisme crânien, accident vasculaire cérébral, etc. entrainant un « état de coma prolongé » jugé irréversible

J’indique ici notamment si j’accepte ou si je refuse que l’on me maintienne artificiellement en vie dans le cas où j’aurais définitivement perdu conscience et où je ne pourrais plus communiquer avec mes proches.

2. A propos des actes et des traitements médicaux dont je pourrais faire l’objet.

La loi prévoit qu’au titre du refus de l’obstination déraisonnable, ils peuvent ne pas être entrepris ou être arrêtés s’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie.

J’indique donc ici si j’accepte ou si je refuse de tels actes. Par exemple : réanimation cardio respiratoire, assistance respiratoire, alimentation et hydratation artificielles, etc.

3. A propos de la sédation profonde et continue associée à un traitement de la douleur

En cas d’arrêt des traitements qui me maintiennent en vie, j’indique ici si je veux ou non bénéficier d’une sédation profonde et continue associée à un traitement de la douleur, c’est-à dire d’un traitement qui m’endort et a pour objectif la perte de conscience jusqu’à mon décès.

 

Ces trois questions méritent d’être lues et relues. Tous les termes y ont une importance. Une explication avec un professionnel de santé (son médecin traitant) est souhaitable.

Des questions sans réponses

Rédiger des Directives Anticipées n’est pas un acte facile pour de nombreuses raisons.

La première est naturellement la difficulté à anticiper l’inconnu, la peur de la mort.

Mais beaucoup d’autres questions se posent aussi :

  • Comment ce que j’écris aujourd’hui pourra-t-il correspondre à ce que je serai demain ?
  • Comment mettre ma mort en formulaire ?
  • N’y a-t-il pas un risque à déresponsabiliser les médecins s’ils n’ont qu’à suivre des directives. Qu’en sera-t-il alors de la notion d’accompagnement, de partage.
  • Le personnel de santé est-il prêt à écouter, les Directives Anticipées seront-elles respectées. Les soignants ont été formés pour soigner, lutter contre la mort pas pour préparer à celle-ci.

Nous avons peur de notre fin de vie (et de celle de nos proches). Nous redoutons la douleur et la perte de dignité que trop souvent elle implique. Anticiper cette fin de vie c’est essayer de la maitriser. Les Directives Anticipées sont un des outils de cette anticipation, un outil de liberté et d’autonomie individuelle. Elles sont aussi un outil de réflexion, de dialogue et de partage qui tous les trois nécessitent de prendre du temps. Elles sont enfin un acte de respect de ses proches.

Les Directives Anticipées nécessitent la formation et l’information de tous, usagers et professionnels de santé. Mais, si rédiger des Directives Anticipées est un droit, ce n’est pas un devoir.

A noter : refus de l’acharnement thérapeutique et arrêt des soins

On parle d’obstination déraisonnable (ou d’acharnement thérapeutique) lorsque des traitements sont poursuivis alors qu’ils sont inutiles, disproportionnés ou n'ayant pas d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie. Le médecin doit s’abstenir de toute obstination déraisonnable et le patient a le droit à la non-obstination déraisonnable.

Le refus de l’obstination déraisonnable n’est pas l’arrêt des soins mais la pratique de soins adaptés :

  • Traitement de la douleur
  • Sédation profonde et continue jusqu'au décès si le patient le souhaite et si la situation remplit les conditions précisées par la loi
  • Soulagement des symptômes
  • Accompagnement du patient et de ses proches

Source

  • https://www.parlons-fin-de-vie.fr/
  • https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32010

 

 

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