Les enfants et le confinement
par le Docteur Didier Potier, conseiller médical de la MSM
Comment les enfants ont-ils vécu le premier confinement (mi-mars/mi-mai 2020) qui, rappelons-le, a vu les écoles fermées et les enfants bloqués à la maison pendant 2 mois. Ont-ils joué, travaillé, regardé des écrans, leur moral, leur sommeil ont-ils été affectés ?
Les résultats d’une enquête de l’Institut National des Etudes démographiques (INED) portant sur les enfants de 8-9 ans, et parue récemment, permettent de répondre à ces questions : ils ont joué ou lu, beaucoup ; fait leurs devoirs, souvent ; aidé leurs parents, parfois ; sont sortis se promener, un peu.
Le travail scolaire
Malgré la fermeture des écoles, le contact entre les enseignants et les familles n’a pas été rompu. La quasi-totalité des parents interrogés déclarent ainsi que l’enseignant a transmis du travail scolaire, que cela s’est fait sans trop de difficultés techniques et que le travail scolaire des enfants à la maison s’est plutôt bien passé. Deux tiers d’entre eux ont pu facilement s’isoler pour travailler. La grande majorité a bénéficié de l’aide d’un proche (par ordre d’importance la mère, le père, parfois un frère ou une sœur). Mais, dans un cas sur deux, ces proches auraient éprouvé des difficultés pour aider les enfants.
Les deux-tiers d’entre eux ont travaillé moins de trois heures par jour ; seuls 13 % ont été aidés plus de 3 heures par jour. Les chances d’être aidé ont été meilleures dans les foyers à dominante employé, ouvrier ou de travailleur indépendant que dans ceux avec des parents cadres.
Les écrans
En dehors du travail scolaire, les enfants ont consacré en moyenne 2h45 par jour aux écrans, 1h45 à la lecture, aux activités artistiques et aux jeux de société, et plus de deux heures aux activités physiques et sportives.
Les écrans ont représenté plus de deux tiers du temps total de loisir pour 13 % des enfants. La probabilité de faire partie de ces « gros consommateurs » double chez les enfants vivant en appartement par rapport à ceux habitant en maison. Elle est plus importante chez les garçons que chez les filles, chez les enfants uniques que dans les fratries et chez les enfants vivant dans des foyers à revenu modestes.
Les tâches domestiques
Un peu moins de la moitié des parents déclarent une augmentation de la participation de leur enfant aux tâches domestiques pendant le confinement, des filles plus souvent que des garçons. C’est lorsque leurs deux parents travaillent et dans les foyers aisés que l’augmentation de la participation des enfants est la plus forte.
Le moral
Ce bouleversement des activités quotidiennes a constitué une expérience potentiellement anxiogène et aurait pu retentir sur l’entente familiale, la qualité du sommeil et l’équilibre psychologique des enfants.
La majorité des parents juge que le climat familial ne s’est pas dégradé pendant le confinement et même ¼ d’entre eux note une amélioration. Mais ces relations ont été moins bonnes dans les situations économiques difficiles et l’absence d’accès du logement à un espace extérieur.
Avec la disparition de l’obligation de se lever pour aller à l’école, près de 40 % des enfants ont vu leur durée de sommeil augmenter, mais elle a cependant diminué pour 14 % d’entre eux. La qualité du sommeil a été affecté par le confinement pour 22 % des enfants (difficultés d’endormissement ou réveils nocturnes). Les filles, les enfants vivant en immeuble et dans des familles en difficulté financières ont été les plus touchés.
Seuls 13 % des enfants ont connu des difficultés psychologiques comme l’isolement, l’anxiété, la difficulté à se concentrer ou l’impulsivité. Ces problèmes sont, là encore, très liés au type de famille, de logement mais touchent plus les garçons que les filles.
Les difficultés intra-familiale, de sommeil ou psychologiques ont progressé tout au long du confinement. Le temps de travail et d’écran est resté stable.
Conclusion
En dépit du bouleversement de leur quotidien, les enfants de 8-9 ans se sont plutôt bien adaptés au premier confinement. Le cadre protecteur de la famille a amorti le choc de la crise sanitaire et économique. Cependant une partie d’entre eux l’a vécu plus difficilement, subissant indirectement les difficultés rencontrées par les parents les plus éprouvés.
Source
Les enfants à l’épreuve du premier confinement. INED : https://www.ined.fr/fr/publications/editions/population-et-societes/enfants-a-epreuve-du-premier-confinement/